J’avais déjà eu l’occasion de vous parler de mon engagement pour un plan de lutte contre les discriminations centré sur les entreprises et leurs pratiques et qui s’appuierait sur les emplois francs. En tant que DRH depuis 20 ans, je sais qu’une entreprise qui recrute n’attendra pas après un avantage fiscal même important et même d’une grande simplicité pour pourvoir ses postes. Nous voila donc dans un cercle vicieux où celles et ceux qui sont le plus éloignés de l’emploi où qui n’ont pas le réseau nécessaire se voient encore une fois assignés à résidence, stigmatisés dans leurs quartiers. Dans ma vie professionnelle, j’ai pu expérimenter à de nombreuses reprises les vertus du compagnonnage, qui va bien plus loin que le parrainage et de l’intermédiation en particulier avec des jeunes issus des quartiers les plus en difficultés ou de familles très modestes. Il est temps d’entendre la colère et pire la résignation des jeunes de nos quartiers dit politique de la ville. A l’échelle de la France c’est un vaste plan de relance de la cohésion des quartiers et des territoires qu’il faut démarrer mais à l’échelle de chacune des entreprises, PME, ETI, artisans, commerçants, c’est une petite pierre que chaque entrepreneur peut porter pour lutter durable contre les discriminations et jouer son rôle d’acteur engagé dans la Cité.

« Tout en étant indéniable, la discrimination à l’embauche est très difficile à quantifier (voir l’excellent reportage de France Inter). Mais il suffit de souligner le nombre de dispositifs proposés ces dernières années pour comprendre qu’il s’agit bien d’un poison sournois de nos sociétés. »

Pour tenter d’y remédier, le gouvernement a décidé remettre au goût du jour les emplois francs, promesse de campagne d’Emmanuel Macron, en expérimentant le dispositif pendant 12 mois à compter d’avril 2018.

Dans le cadre du travail engagé autour de la loi égalité et citoyenneté avec Groupe d’Etudes que je pilote, nous avons proposé de lancer une expérimentation qui pourrait s’inclure dans le dispositif des emplois francs. Il s’agit d’un projet de dispositif expérimental francilien d’intermédiation entre les entreprises qui recrutent, notamment les PME et ETI, et les jeunes des quartiers prioritaires prêts ou proches de l’emploi, qu’ils soient diplômés ou non, mais sujets à des discriminations structurelles.

Ce dispositif expérimental a vocation à s’articuler avec l’expérimentation des emplois francs et plus largement avec le Plan « Insertion pour la jeunesse des quartiers prioritaires » de la préfecture d’Île-de-France. Il vise à mettre les entreprises au cœur d’un dispositif d’inclusion économique pour qu’elles puissent jouer pleinement leur rôle d’acteur du territoire. Ce « Plan 1000 jeunes » part du principe qu’en diversifiant les sources de candidats, les entreprises recruteront plus vite, ce qui devient un atout à la fois économique et de responsabilité sociale.

Le sens de la démarche

  • Distinguer l’inclusion économique par l’emploi des dispositifs d’insertion sociale en affirmant par l’action un nouveau « paradigme de l’inclusion économique » centré sur les jeunes prêts ou proches de l’emploi (par distinction des publics éloignés de l’emploi) mais sujets à des discriminations structurelles ;
  • Partir de l’entreprise, de ses besoins et de son potentiel économique d’embauche et d’accompagnement pour faire évoluer durablement les pratiques de recrutement;
  • Construire une nouvelle fonction d’intermédiation dédiée aux candidats potentiellement discriminés issus des territoires prioritaires;
  • Intégrer des approches novatrices, notamment numériques, en matière de rapprochement entre l’offre et la demande d’emploi comme de parrainage ou d’égalité des chances territoriales ;
  • Inventer une gouvernance territoriale multi-acteurs lisible pour l’utilisateur candidat et entreprises avec une vocation affichée de lutte contre les discriminations en particulier pour les PME et ETI ;
  • Créer un continuum entre les dispositifs d’insertion sociale et les dispositifs d’inclusion économique par l’emploi, notamment en s’articulant avec le Plan d’insertion pour la jeunesse des quartiers prioritaires de la Préfecture d’Île-de-France ;
  • Démontrer la valeur ajoutée de l’intermédiation en évaluant sa contribution positive et en mesurant son impact social, économique et territorial.

Les caractéristiques du dispositif

Objectif de 1000 candidats placés en un an (CDI, CDD +6mois, alternance) ;

  • Une durée de 12 mois, en parallèle de l’expérimentation des emplois francs, avec possibilité de prorogation de 2 années si le bilan de la première année est concluant
  • Un dispositif expérimental gratuit pour les bénéficiaires (candidats et entreprises)
  • Le public : les jeunes prêts ou proches de l’emploi, diplômés et non diplômés, issus des quartiers prioritaires pilotes ;
  • Une plateforme digitale unique dédiée au dispositif expérimental : la plateforme DiversifiezVosTalents.com de MOZAÏK RH centrée sur les aptitudes et les compétences transversales des candidats (soft skills), en mettant de côté le CV ;
  • Des services d’accompagnement candidats et entreprises opérés par la fondation FACE et articulés avec la plateforme digitale unique (CV vidéo, CV à l’envers pour les entreprises, parrainage, suivi de l’intégration au sein de l’entreprise).

La plus-value du dispositif

  • Le déploiement d’un nouveau paradigme de la politique de la ville : un dispositif centré sur les petites et moyennes entreprises avec la volonté de les accompagner dans les pratiques de luttes contre les discriminations à l’embauche ; un pilotage territorial des acteurs ;
  • L’intensification du sourcing des entreprises qui recrutent : un dispositif de remontée systématique des offres d’emploi par territoire ;
  • L’engagement des entreprises dans l’animation et la gouvernance de leur territoire ;
  • La spécialisation du sourcing des candidats potentiellement discriminés : un dispositif d’identification, d’accompagnement et de pré-qualification dédié ;
  • L’intégration d’une pluralité d’outils sur un même territoire et la montée à l’échelle
  • La création d’un continuum avec le Plan d’insertion pour la jeunesse des quartiers prioritaires en Île-de-France ;
  • La production de nouvelle connaissance sur l’intermédiation : le volet évaluation scientifique.

Les 6 territoires de l’expérimentation

En référence au déploiement du dispositif expérimental des emplois francs, il est choisi de retenir deux types de territoires pour pouvoir comparer les effets de l’intermédiation et du pilotage opérationnel multi-acteurs :

  • Territoires hors emplois francs (intermédiation et pilotage – pas d’avantage fiscal) :
  • Territoires emplois francs (intermédiation, pilotage et avantage fiscal)
    • Grigny (91)
    • 3 quartiers de Plaine-Commune (93)

La gouvernance de l’action pilote

  • Les Comités de pilotage opérationnel par territoire pilote présidé par le représentant du Préfet d’Île-de-France (préfet du département ou sous-préfet) et composé des acteurs économiques du territoire (DIRECCTE, Pôle emploi, Apec, Missions Locales, associations de quartiers…), et les représentants des entreprises (Medef, CCI, CPME, CJD…).
  • Le Comité de suivi de l’expérimentation dans son ensemble présidé par le Député Didier Baichère et composé des membres du Groupe de travail sur l’inclusion économique animé par le Député Didier Baichère qui réunit les acteurs de l’emploi et de l’intermédiation (Pôle emploi, APEC, DIRECCTE, Fondation FACE, Mozaïk RH, ANDRH, AFMD, Syntec recrutement, Article.1…)et élargi aux représentant du Préfet d’Île-de-France et des représentants des organisations patronales et les entreprises opérationnellement mobilisées sur les territoires.
Les opérateurs missionnés : FACE et MOZAÏK RH avec Pôle Emploi et l’APEC

Présentation du projet à la Préfecture de région le 4 avril 2018